The Five One Review

I augment you

Poem

Deux vrais amis

Deux vrais amis vivaient au Monomotapa :
L'un ne possédait rien qui n'appartînt à l'autre :
Les amis de ce pays-là
Valent bien, dit-on, ceux du nôtre.
Une nuit que chacun s'occupait au sommeil,
Et mettait à profit l'absence du soleil,
Un de nos deux Amis sort du lit en alarme ;
Il court chez son intime, éveille les Valets :
Morphée avait touché le seuil de ce palais.
L'ami couché s'étonne, il prend sa bourse, il s'arme ;
Vient trouver l'autre, et dit : Il vous arrive peu
De courir quand on dort ; vous me paraissez homme
A mieux user du temps destiné pour le somme :
N'auriez-vous point perdu tout votre argent au jeu ?
En voici. S'il vous est venu quelque querelle,
J'ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point
De coucher toujours seul ? Une esclave assez belle
Était à mes côtés ; voulez-vous qu'on l'appelle ?
Non, dit l'ami, ce n'est ni l'un ni l'autre point :
Je vous rends grâce de ce zèle.
Vous m'êtes en dormant un peu triste apparu ;
J'ai craint qu'il ne fût vrai, je suis vite accouru.
Ce maudit songe en est la cause.
Qui d'eux aimait le mieux ? Que t'en semble, lecteur ?
Cette difficulté vaut bien qu'on la propose.
Qu'un ami véritable est une douce chose!
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur ;
Il vous épargne la pudeur
De les lui découvrir vous-même.
Un songe, un rien, tout lui fait peur
Quand il s'agit de ce qu'il aime.

Jean de La Fontaine

Two true friends

Two true friends lived in Monomotapa:
The one owned nothing that did not belong to the other:
The friends of that land
Are well worth, it is said, those of ours.
One night that each was busy sleeping,
And putting to good use the sun’s sinking,
One of our two friends leaves his bed in haste;
He runs to his fellow, there the servants awakes:
Morpheus had come to that palace.
The laying friend, surprised, takes his purse, arms himself;
Comes to find the other, and says: seldom
Do you run while we rest; I thought you the kind of man
To give more consideration to the time afforded to sleep:
Have you lost your money at gambling?
Here is some. If you’ve come into a quarrel,
I have my sword, let’s go. Are you tired
Of sleeping alone? Quite a pretty slave
Was by my side; shall I call for her?
No, the friend said, it is none of these points:
I am grateful for your zeal.
During my sleep you appeared to me sad;
I feared it might be true, so ran over as fast I could.
That wretched dream is the cause.
Who of the two loved better? What say you, reader?
This difficulty is worth a thought.
How sweet a thing is a genuine friend!
He seeks out your needs from the bottom of your heart;
He spares you the prudery
Of uncovering them for him yourself.
A dream, a nothing, all scares him
When it comes to what he loves.

Jean de La Fontaine (translated by Olivier Holmey)

Music

L’Amitié
Françoise Hardy

Image

Night Journey, Charles-François Daubigny
Courtesy National Gallery of Art, Washington