The Five One Review

He saw the golden star

Poem

Stella

Je m'étais endormi la nuit près de la grève.
Un vent frais m'éveilla, je sortis de mon rêve,
J'ouvris les yeux, je vis l'étoile du matin.
Elle resplendissait au fond du ciel lointain
Dans une blancheur molle, infinie et charmante.
Aquilon s'enfuyait emportant la tourmente.
L'astre éclatant changeait la nuée en duvet.
C'était une clarté qui pensait, qui vivait ;
Elle apaisait l'écueil où la vague déferle ;
On croyait voir une âme à travers une perle.
Il faisait nuit encor, l'ombre régnait en vain,
Le ciel s'illuminait d'un sourire divin.
La lueur argentait le haut du mât qui penche ;
Le navire était noir, mais la voile était blanche ;
Des goëlands debout sur un escarpement,
Attentifs, contemplaient l'étoile gravement
Comme un oiseau céleste et fait d'une étincelle ;
L'océan, qui ressemble au peuple, allait vers elle,
Et, rugissant tout bas, la regardait briller,
Et semblait avoir peur de la faire envoler.
Un ineffable amour emplissait l'étendue.
L'herbe verte à mes pieds frissonnait éperdue,
Les oiseaux se parlaient dans les nids ; une fleur
Qui s'éveillait me dit : c'est l'étoile ma sœur.
Et pendant qu'à longs plis l'ombre levait son voile,
J'entendis une voix qui venait de l'étoile
Et qui disait : - Je suis l'astre qui vient d'abord.
Je suis celle qu'on croit dans la tombe et qui sort.
J'ai lui sur le Sina, j'ai lui sur le Taygète ;
Je suis le caillou d'or et de feu que Dieu jette,
Comme avec une fronde, au front noir de la nuit.
Je suis ce qui renaît quand un monde est détruit.
Ô nations ! je suis la poésie ardente.
J'ai brillé sur Moïse et j'ai brillé sur Dante.
Le lion océan est amoureux de moi.
J'arrive. Levez-vous, vertu, courage, foi !
Penseurs, esprits, montez sur la tour, sentinelles !
Paupières, ouvrez-vous, allumez-vous, prunelles,
Terre, émeus le sillon, vie, éveille le bruit,
Debout, vous qui dormez ! - car celui qui me suit,
Car celui qui m'envoie en avant la première,
C'est l'ange Liberté, c'est le géant Lumière !

Victor Hugo

Stella

I had fallen asleep that night by the marine stream.
A fresh wind woke me, I departed my dream.
I opened my eyes, saw the morning star.
In the sky she was sparkling from afar
In a limp whiteness, infinite and charming.
Aquilo was fleeing together with his storming.
The glistening star was changing clouds into fluff,
It was a thinking, living stuff;
She was appeasing the reef upon which waves hurl;
It was as if one saw a soul through a pearl.
The night was still upon us, the shadow reigned but only a while,
In the sky was beginning to shine a divine smile.
The gleam lay on the tilting mast a silver light;
The ship was black, but the sail was white;
Seagulls standing on the edge of a cliff,
Attentive, were contemplating the star grave and stiff
Like a celestial bird made of a flicker;
The ocean, which resembles the people, moved toward her,
And, roaring quietly, watched her shine bright,
And seemed nervous that it would make her take flight.
An unspeakable love filled the expanse,
The green grass at my feet shivered and danced,
The birds in their nests conversed; a flower
That was awakening told me: it’s the star my sister.
And while the shadow lifted its layer upon layer,
The star began to share
A few words: – I am the celestial body that comes first.
I am she who is believed to be in her tomb yet out she bursts.
I shone on the Sinai, I shone on the Taygetos;
I am the stone of gold and fire that God does toss,
As with a sling, to the black front of the night.
I am what is reborn when a world dies at the end of the fight.
Oh nations! I am the poetry of the ardent day.
I shone on Moses and I shone on Dante.
The lion ocean is in love with me.
I am coming. Virtue, courage, faith, stand before me!
Thinkers, spirits, climb up the tower, sentinels!
Eyelids, open up, light up, pupils,
Earth, feel the furrow, live, let the noise be,
Up, you who sleep! – for the one who follows me,
For the one who is first to send me forth through the night
Is the angel Liberty, the giant Light!

Victor Hugo (translated by Olivier Holmey)

Music

Abends will ich schlafen gehn, Hänsel und Gretel
Engelbert Humperdinck

 

Image

20 June 1776, Archibald Robertson
The New York Public Library